Voici une petite synthĂšse de la rĂ©vision dâun loyer en cours de bail selon la procĂ©dure dite de rĂ©vision judiciaire de lâarticle L. 145-39 du Code de commerce (Ă©volution de plus de 25% du loyer)
Lâinflation de lâindice INSEE du coĂ»t de la construction ces derniĂšres annĂ©es a remis au goĂ»t du jour un article du Code de commerce inusitĂ© depuis quelques annĂ©es, savoir lâarticle L. 145-39, qui prĂ©voit une mĂ©thode dite de rĂ©vision judiciaire du loyer, en cas dâĂ©volution du loyer de plus de 25% par rapport au dernier loyer fixĂ© contractuellement ou judiciairement (i.e. loyer dâorigine ou de renouvellement), par application de lâindexation conventionnelle annuelle.
Pour mieux comprendre son fonctionnement, il faut en revenir aux principes de la rĂ©vision du loyer dâun bail commercial en cours dâexĂ©cution.
Selon les dispositions du Code de commerce, et en fonction des stipulations du bail, il existe deux types de rĂ©vision lĂ©gale du loyer dâun bail commercial, qui sont dâordre public :
1. La rĂ©vision triennale lĂ©gale, encadrĂ©e par lâarticle L. 145-38 du Code de commerce, sâapplique dâoffice Ă chaque Ă©chĂ©ance triennale, en lâabsence de clause dans le bail prĂ©voyant toute autre mĂ©thode de rĂ©vision du loyer (et notamment en lâabsence de clause dâindexation ou clause dâĂ©chelle mobile) ;
2. La rĂ©vision rĂ©sultant de lâexistence dâune clause dâĂ©chelle mobile, encadrĂ©e par lâarticle L. 145-39, sâapplique lorsque, « par le jeu de lâapplication de la clause dâĂ©chelle mobile stipulĂ©e au bail, le loyer se trouve augmentĂ© ou diminuĂ© de plus dâun quart par rapport au prix prĂ©cĂ©demment fixĂ© contractuellement ou par dĂ©cision judiciaire. »
1. Dans la pratique, la rĂ©vision triennale lĂ©gale a aujourdâhui pratiquement disparue. En effet, la rĂ©vision triennale sâapplique Ă dĂ©faut de stipulation dans le bail dâune clause de rĂ©vision conventionnelle (i.e. clause dâindexation). Or aujourdâhui, la quasi-totalitĂ© des baux prĂ©voient une clause dite dâindexation du loyer ou clause dâĂ©chelle mobile, qui autorise le bailleur Ă indexer chaque annĂ©e le loyer sur un indice choisi dâun commun accord entre les parties.
En effet, ces clauses dâindexation prĂ©sentent un double intĂ©rĂȘt :
a. Elles permettent dâĂ©viter les effets de lâĂ©rosion monĂ©taire ;
b. En outre, elles permettent une Ă©volution « paisible » du loyer, chaque annĂ©e, alors que le mĂ©canisme des articles L. 145-38 et L. 145-39 du Code de commerce peut ĂȘtre brutal, dans la mesure oĂč lâĂ©volution du loyer sâeffectue, par le jeu de ses articles, tous les 3 ans (rĂ©vision triennale lĂ©gale) ou Ă chaque fois que par le jeu de la clause dâĂ©chelle mobile, le loyer a augmentĂ© ou diminuĂ© de plus de 25% par rapport au loyer dâorigine.
2. A ce jour, la rĂ©vision rĂ©sultant de lâexistence dâune clause dâĂ©chelle mobile, par application des dispositions de lâarticle L. 145-39, nâa encre jamais Ă©tĂ© appliquĂ©e, dans la mesure oĂč lâĂ©volution de lâindice INSEE du coĂ»t de la construction (« lâICC ») ne faisait jamais varier le loyer de plus ou moins 25% par rapport au loyer dâorigine.
Cependant, ces derniĂšres annĂ©es, la tendance sâest inversĂ©e, lâICC ayant connu depuis 2001 une Ă©volution moyenne de lâordre de 3 Ă 5% par an. Aujourdâhui, la totalitĂ© des loyers des baux conclus en 2001 ou avant ont augmentĂ© de plus de 25%, ce qui ouvre automatiquement droit au locataire de demander Ă bĂ©nĂ©ficier des dispositions de lâarticle L. 145-39.
Cependant, le bĂ©nĂ©fice de lâarticle L. 145-39 du Code de commerce nâest pas automatique. En effet :
a. Lâune des parties doit en demander lâapplication et, Ă ce titre, le formalisme est assez contraignant. En effet, la demande dâadaptation du loyer devra ĂȘtre notifiĂ©e par acte dâhuissier ou lettre recommandĂ©e avec accusĂ© de rĂ©ception, indiquant impĂ©rativement le nouveau loyer demandĂ©. A dĂ©faut dâaccord des parties sur ce nouveau loyer, la partie la plus diligente pourra effectuer une demande de rĂ©vision en justice ;
b. Lâadaptation du loyer est effectuĂ©e par application de la valeur locative. Donc, encore faut-il que lâĂ©volution du loyer telle quâelle a lieu par application de la clause dâĂ©chelle mobile soit totalement dĂ©corrĂ©lĂ©e de lâĂ©volution de la valeur locative des surfaces louĂ©es.
Ainsi un preneur demandera Ă bĂ©nĂ©ficier de la rĂ©vision judiciaire du loyer si (i) le loyer rĂ©sultant des indexations intervenues a dĂ©passĂ© de plus de 25% le loyer initial et (ii) dans la mesure oĂč la valeur locative est infĂ©rieure au loyer rĂ©sultant des indexations intervenues.
Et un bailleur demandera Ă bĂ©nĂ©ficier de la rĂ©vision judiciaire du loyer si (i) le loyer rĂ©sultant des indexations intervenues a diminuĂ© de plus de 25% par rapport au loyer initial et (ii) dans la mesure oĂč la valeur locative est supĂ©rieure au loyer rĂ©sultant des indexations intervenues.
En outre, le bailleur a intĂ©rĂȘt a demander la rĂ©vision judiciaire du loyer, sur le fondement de lâarticle L. 145-39, lorsque le loyer rĂ©sultant de lâindexation, tout en ayant augmentĂ© de plus de 25% par rapport au loyer dâorigine, se trouve nĂ©anmoins infĂ©rieur Ă la valeur locative. La jurisprudence a ainsi admis que le bailleur puisse obtenir la fixation du loyer Ă un montant supĂ©rieur Ă celui rĂ©sultant du simple jeu de la clause dâĂ©chelle mobile.
La solution que pourrait envisager les parties Ă un bail commercial pour contrecarrer les effets de lâarticle L. 145-39 du Code de commerce, pourrait consister en une dĂ©finition contractuelle des critĂšres de dĂ©termination de la valeur locative permettant de corrĂ©ler plus fortement lâĂ©volution de cette valeur locative et lâĂ©volution de lâICC.
Les critĂšres de dĂ©termination de la valeur locative sont fixĂ©s par les articles L. 145-33 du Code de commerce et 23-3 du dĂ©cret de 1953 (qui ne sont pas dâordre public et qui peuvent donc ĂȘtre Ă©cartĂ©s dans le bail) :
a. Les caractéristiques du local considéré,
b. La destination des locaux loués,
c. Les obligations respectives des parties (en ce compris les obligations incombant en principe au bailleur et dont celui-ci sâest dĂ©chargĂ© sur le locataire sans contrepartie),
d. Les facteurs locaux de commercialité,
e. Les prix couramment pratiqués dans le voisinage,
f. Les éventuelles restrictions à la jouissance des locaux loués.
Cependant, rien nâinterdit aux parties de dĂ©finir dâautres critĂšres de dĂ©termination de la valeur locative, les articles L. 145-33 du Code de commerce et 23-3 du dĂ©cret de 1953 nâĂ©tant pas dâordre public.
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