Le droit d’entrée est-il en train de disparaître ?

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Invention des années 80, lorsque le toujours-plus menait les politiques d’expansion tant des promoteurs que des distributeurs, le droit au bail est malmené par la crise. Sa justification a-t-elle disparu pour autant ? Doit-il être banni de tous les sites à la fois : sites ex nihilo, extensions, rénovations, lieux de transit… Et s’il ne traduisait tout simplement que l’équilibre entre les commerçants en place – producteurs de la commercialité – et ceux qui les rejoignent ? C’est la question que pose le rédacteur de cette tribune, Maxime Péribère, coprésident d’Accessite, commercialisateur et gestionnaire de plus de 1 000 baux de commerces en galerie marchande.

Inventé dans les années 80, le droit d’entrée s’est assez vite imposé chez les bailleurs comme un des éléments incontournables du processus normal de commercialisation des nouveaux sites commerciaux ou des extensions. Les bailleurs étaient à cette époque, il faut le rappeler, dans une période relativement créative du «toujours plus». Plus de clauses dans les baux, plus de contraintes techniques, plus de charges refacturables, plus de loyers.

Côté enseigne, même volonté cependant de «toujours-plus». Plus de besoins, plus d’ouvertures, plus de chiffres d’affaires et plus de croissance in fine. Pour un site en création, le droit d’entrée venait rémunérer la commercialité future, il anticipait la valeur du fonds de commerce créé et en transférait par anticipation une partie au profit du promoteur qui, après tout, avait œuvré à sa création.

Même démarche pour les extensions de sites, mais sur la base d’une commercialité réelle et préexistante et avec une vertu essentielle pour les commerçants déjà en place : la valorisation indirecte de leur droit au bail. Dernier cas de figure : le droit d’entrée sur des locaux laissés vacants précédemment exploités par une autre enseigne, le plus souvent en compensation des préaménagements présents dans le local, du sol à la climatisation en passant par les vitrines.

Jusque-là, rien de très choquant puisque tant bailleurs que preneurs y ont, pendant des années, trouvé leur intérêt. Mais la crise est passée par là ! Celle-là même qui a modifié la soif d’achat des consommateurs, les performances des boutiques et le rapport de forces entre les acteurs de notre profession.

Le droit d’entrée, au milieu de tout cela, est assez naturellement devenu une variable d’ajustement. Les investisseurs institutionnels, prioritairement concernés par la valorisation annuelle de leur revenu locatif global – cours de Bourse ou rapport annuel oblige -, ont tout concentré sur le loyer, indicateur de performance financière par excellence, qu’il fallait protéger à tout prix. De grandes foncières ont ainsi purement et simplement supprimé les droits d’entrée, mais aussi, pour certaines, les honoraires de commercialisation et certains frais techniques. Focus sur le loyer et rien que le loyer.
Autrefois aux alentours de 24 mois de loyer, le droit d’entrée est aujourd’hui souvent plus proche de la moitié. Il a effectivement disparu de bon nombre de projets, mais au fond, est-ce une bonne chose pour les enseignes ?

Un centre commercial renommé proche du Luxembourg va prochainement lancer la commercialisation de sa troisième tranche avec un droit d’entrée de 12 mois de loyers associé à des valeurs locatives raisonnables. N’est-ce pas après tout une équation proportionnée, respectueuse des nouveaux entrants et des commerçants en place, dont certains sont actuellement en train de valoriser leur fonds de commerce sans difficulté ?
Le droit d’entrée doit-il disparaître ? Le droit d’entrée va-t-il disparaître ? Après tout, pourquoi vouloir trancher aussi sévèrement ? Et si une fois de plus, tout n’était pas tout simplement une question d’équilibre ?

AUTEUR
Maxime Péribère