La tendance multicanale devient une réalité pour tous les internautes

Interview de Marc Lolivier, Délégué Général de la FEVAD

À l’occasion de la publication du 4ème baromètre annuel de la FEVAD et de Médiamétrie / Net Ratings sur les comportements d’achats des internautes, l’IAB a interrogé Marc Lolivier.

IAB. Quel constat tirez-vous du 4ème baromètre annuel ? 

ML. Notre dernière étude illustre la tendance multicanale qui devient une réalité pour tous les internautes. Désormais, le client veut avoir le choix entre plusieurs canaux, pouvoir choisir son moyen d’entrer en contact avec le commerçant. Pour les entreprises, l’enjeu est de répondre à cette demande, d’où la nécessité d’être présent sur tous les canaux, qu’ils soient destinés à la vente ou à la prescription. Il ne s’agit pas de basculer dans le « tout Internet » ou de balayer l’existant mais de trouver des vecteurs d’approche complémentaires et des synergies qui, bien pensés, peuvent s’avérer de puissants relais de croissance. Pour cela, il importe de développer une vision globale multicanale tout en tenant compte de sa clientèle et de son « core business ». Les consommateurs pourront en permanence se connecter à leur magasin ou se connecter à partir du magasin. Ils pourront à tout moment rechercher un produit ou service et décider s’ils veulent l’acheter en ligne ou en magasin.

IAB. Plus d’un Français sur trois achète sur Internet, l’e-commerce séduit l’ensemble des Français, doit-on considérer que la « fracture numérique » est en train de se combler ?

ML. Effectivement, des catégories de la population jusqu’ici les moins cyberconsommatrices du fait de leur sous-équipement visitent régulièrement des sites marchands. Le baromètre indique que 64 % des internautes de plus de 50 ans et 66 % des internautes CSP- ont déjà effectué un achat en ligne. Avec l’envie sous-jacente de pouvoir aussi profiter des bons plans réservés jusqu’ici à des franges « privilégiées » de la population. N’oublions pas que la moitié des internautes estime que les prix sont moins élevés sur Internet.

IAB. La croissance des ventes va de pair avec le nombre d’entreprises qui vendent sur le web… ? 

ML. Il se crée un site marchand presque toutes les heures en France ! Le nombre d’e-marchands a augmenté de 50 % en 2007 et ce sont surtout des PME qui arrivent sur le marché. Pour les cyberacheteurs, c’est l’assurance de trouver tout ou presque en ligne. Reste que les transactions doivent bien se passer pour eux. Or, il est plus facile d’imposer des règles de déontologie lorsque vous avez un petit nombre d’acteurs sur le marché.

IAB. Pourtant, les échanges semblent bien se dérouler si l’on en croit l’immense satisfaction des cyberacheteurs….

ML. C’est probablement, pour nous, le résultat le plus important de l’étude : 97 % des personnes interrogées se disent satisfaites ou très satisfaites de leurs achats sur Internet. Cela traduit évidemment les efforts des sites marchands pour se placer à la hauteur des attentes de leurs clients en termes de livraison, délais ou service après-vente. Et puis c’est un signe très encourageant : la confiance est primordiale lorsque vous faites du commerce…

IAB. Le baromètre confirme également que les internautes n’hésitent plus à acheter sur des sites étrangers…


ML.
 Absolument, 23 % des internautes nous déclarent avoir acheté sur des sites étrangers au cours des six derniers mois. C’est là un phénomène inédit : c’est la première fois dans l’histoire du commerce de détail que l’on constate l’existence d’un commerce global. Jusqu’ici, l’e-commerce était pour l’essentiel national ou à destination des pays limitrophes.

IAB. Quelles sont les conséquences sur le plan juridique ?

ML. Forcément, lorsqu’on passe de l’achat en ligne national au « shopping sans frontières », les règles qui s’appliquent ne sont plus les mêmes. Ceci nous conduit d’ailleurs à alerter les pouvoirs publics sur le sujet, car les risques de distorsion de la concurrence sont évidents. Dans tous les cas, désormais, il nous faut raisonner au niveau sinon mondial, du moins européen.

IAB. Peut-on imaginer, à terme, qu’Internet et le téléphone se disputent la primauté de la vente à distance, au détriment du catalogue papier classique ?

ML. Je ne crois pas en un effet de substitution. Les techniques récentes de vente à distance, téléphone et Internet, ne viennent pas supplanter les modes classiques de vente, elles les complètent. Mais cette complémentarité introduit de la complexité dans l’approche des producteurs et annonceurs. Prenez la population des 15-25 ans, c’est la plus grosse population de vente à distance, pour qui Internet est au cœur du comportement d’achat. Une stratégie qui viserait ce public sans y associer Internet serait vouée à l’échec. Pour la population des 35-45 ans, le téléphone demeure l’outil d’achat à distance alors que les plus de 50 ans, habitués au courrier postal, se mettent de plus de plus à Internet. À chaque âge, son mode de commande !
De même que la publicité en ligne ne va pas remplacer la publicité sur les supports classiques, l’e-commerce ne va pas balayer le commerce traditionnel. Nous ne comptons pas aller contre le commerce, mais avec lui.

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Marc Lolivier (FEVAD)