Congés : enfin la clarification !

Publié le Étiquettes , , ,

Parmi les 134 articles de la nouvelle loi « fourre-tout » de simplification du droit du 22 mars 2012, dite loi Warsmann, l’un d’eux est venu retoucher des textes du Code du Commerce régissant le bail commercial. Impact de cette réforme? 

 

Un toilettage bienvenu ! 

Sur le vocabulaire à utiliser… Pour caractériser le régime du bail se poursuivant au-delà de son terme en l’absence de congé ou demande de renouvellement, le qualification de reconduction a été remplace par celui de prolongation. A raison, car le terme reconduction est impropre, en droit. Dans tout acte / courrier, on veillera donc à utiliser le terme prolongation, dorénavant !

Et surtout sur le régimes des congés ! Afin de supprimer toute références aux usages locaux, la loi LME de 2008 est venue modifier l’art. L. 145-9 du C. de Commerce. Il s’agit du texte de base fixant les règles du jeu applicables aux congés, tel pour calculer les délais et la date de réalisation. Mais la rédaction alambiquée et ambiguë du texte, issu de cette réforme, pouvait être source de confusion. Il a en outre été à l’origine de débats entre juristes sur la « dead-line » pour notifier un congé et apprécier la date effective de résiliation, en particulier pour le congé du locataire en cours de bail.

En pratique : nouvelle donne? 

Congé au terme du bail – côté bailleur. L’art. L. 145-9 visait jusqu’ici un « congé pour le dernier jour du trimestre civil et au mois six mois à l’avance ». Pour un bail se terminant p.ex. le 31 mail, un client pouvait ainsi croire (vu en pratique) qu’il était en droit de notifier son congé jusqu’au 31 décembre. Le texte retouché, applicable depuis le 24.03.2012, précise désormais avec clarté qu’un bail cesse par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance et qu’il est à défaut tacitement prolongé au-delà du terme fixé. Un ADB prendra à cet égare soin d’informer à temps ses clients sur les délais à respecter. Ainsi, dans notre exemple, le congé doit être signifié avant le 30novembre…

Congé en cours de bail – côté locataire. Au vu des retouches apportées à l’art L.145-9 et des travaux parlementaires, il est enfin acquis que le congé d’un locataire à l’issue d’une période triennale peut/doit être délivré pour les troisième, sixième ou neuvième anniversaires, et non pour le dernier jour du trimestre qui leur fait suite.

Congé après le terme d’un bail. Il est expressément précisé qu’un congé doit être donné au mois six mois à l’avance et pour le dernier jour du trimestre civil au cours de la tacite prolongation. Ainsi, si un locataire notifie son congé un 31mai, son préavis prend effet non le 30 novembre, mais bien le 31 décembre. Il doit son loyer jusqu’à cette date….

Conseil. Côté ADB, c’est aussi à cette date qu’il convient, sur le principe, de programmer la remise des clés et l’état des lieux de sortie.

Que faut-il aussi savoir? 

Demande de renouvellement. Comme par le passé, à défaut de congé, le locataire qui veut obtenir le renouvellement de son bail doit en faire la demande soit dans les six mois précédant l’expiration du bail. Et à défaut, le cas échéant, à tout moment au cours de sa « prolongation »…

Forme des congés. Pour supprimer le superflu de formalisme (sic) et éviter les frais d’huissier, des députés avaient demandé que les congés soient désormais notifiés par LRAR. Leurs amendements ont tous été rejetés, la LRAR étant considérée comme un procédé trop léger (sic) au vu du particularisme du congé d’un bail commercial. Il faut donc continuer d’en passer par un huissier.

S’il faut continuer d’en passer par un huissier pour délivrer congé, le doute généré par le loi LME est définitivement levé : le dernier jour du trimestre civil est seulement à prendre en compte en période de tacite prolongation du bail… 

 

Astuces & Conseils immobilier – Nouvelle loi 25.05.2012

Le congé doit être signifié par acte extrajudiciaire

Publié le Étiquettes , ,

À l’expiration du bail dérogatoire initial, le locataire était resté dans les lieux en y exploitant son fonds de commerce et en étant inscrit au registre du commerce. En application de l’article L 145-5 du code de commerce, un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux s’était donc opéré et la cour d’appel en a justement déduit, sans être tenue de procéder aux recherches inopérantes, que le congé devait être donné par acte extrajudiciaire conformément aux dispositions impératives de l’article L 145-9.

À l’issue d’un bail dérogatoire, si le preneur reste en possession des lieux à son échéance, il s’opère alors un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux.

Ce faisant, le locataire ne pouvait délivrer congé selon les formes prévues par le bail dérogatoire d’origine, qui prévoyait un renouvellement par tacite reconduction « sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception trois mois avant l’échéance ».

Selon une jurisprudence constante, le congé délivré par lettre recommandée avec AR est inopérant et s’avère donc sans effet, de telle sorte que le congé devait être donné par acte extrajudiciaire conformément aux dispositions impératives de l’article L 145-9 du code de commerce.

On rappellera cependant que l’irrégularité formelle d’un congé est une nullité relative qui ne peut être invoquée que par le destinataire de l’acte, et l’attention des praticiens doit être attirée lorsque le preneur reste en possession des lieux à l’issue d’un bail dérogatoire : le nouveau bail est alors soumis au statut des baux commerciaux, ce qui implique le respect des dispositions prévues par les textes pour la délivrance du congé qui ne peut donc intervenir que par exploit d’huissier (Cass. 3e civ., 23 mars 2011, n° 10-12254).

AUTEUR
Charles-Edouard Brault
Avocat à la Cour – Cabinet Brault & Associés
Spécialiste en baux commerciaux et professionnels.