La récente publication par Novethic, filiale de la Caisse des Dépôts, en partenariat avec l’ADEME, du baromètre 2011 relatif au reporting sur l’éco performance des bâtiments, et de la première enquête sur les pratiques environnementales des fonds immobiliers (voir documents en annexe de la présente chronique) est riche d’enseignements.
Tout d’abord, vu les progrès réalisés ces dernières années par les professionnels, les indicateurs sont plus exigeants que lors des années précédentes. Au-delà de la mesure de la consommation d’énergie et des émissions de C02, l’« énergie grise » contenue dans les immeubles et la distance aux transports en commun sont désormais prises en considération.
Les 35 sociétés issues des trois métiers analysés (8 promoteurs, 15 foncières, 22 fonds immobiliers) sont très différenciées en matière d’immobilier durable. Les promoteurs ont pris de l’avance car leur profession est centrée sur la construction neuve, activité plus facile à traiter que la gestion d’un parc immobilier ou la gestion d’un fonds d’investissement. Les labels HQE® et BBC Effinergie® jouent un rôle essentiel. L’énergie grise commence à être prise en compte, la distance aux transports en commun est encore rarement mesurée.
La performance environnementale des foncières est plus hétérogène. Huit d’entre elles chiffrent des objectifs de réduction de leur empreinte énergie et carbone. Répondant au scepticisme de nombreux acteurs immobiliers, certaines d’entre elles affichent même des objectifs plus ambitieux que ceux du Grenelle de l’Environnement. La question de la méthode de mesure employée est centrale. Gecina par exemple consacre un chapitre de son rapport développement durable 2010 à cette question. Il est urgent qu’un consensus de la profession se dégage prochainement sur la méthode de mesure de l’empreinte énergie et carbone d’un parc immobilier.
La prise de conscience est beaucoup moins avancée chez les gestionnaires de fonds immobiliers. 68 % d’entre eux ne connaissent pas la performance énergétique moyenne de leur patrimoine, la même proportion n’a pas d’engagement de réduction de l’empreinte énergie et carbone, 77 % n’ont pas déployé d’outils de contractualisation de la performance.
Mais la prise de conscience est en cours, avec la bonne entrée pour un investisseur : le risque d’obsolescence des immeubles non verts. 95 % des gestionnaires de fonds enquêtés pensent que l’intégration de critères d’éco performance permet de « diminuer les risques opérationnels liés à l’obsolescence des bâtiments » et 73 % estiment qu’elle donne lieu à « un meilleur rendement financier sur le long terme ».
L’objectif de réduction de l’empreinte énergie et carbone est extérieur aux professions immobilières. Il est imposé par le politique, au niveau continental, national et, de plus en plus, territorial. Un immeuble n’est pas fait pour économiser l’énergie. Un immeuble est fait pour rendre un certain niveau de service à ses utilisateurs, à un coût d’investissement et de fonctionnement donné.
Pour le secteur privé, un immeuble est aussi une source de rendement financier, menacé d’un risque de décote pour obsolescence, lié à la montée des exigences de performance énergétique et environnementale.
L’investissement « vert » est avant tout un moyen de lutter contre l’obsolescence des immeubles et contre une tendance à la baisse du rendement financier sur le long terme.
barometre 2011 novethic
fonds immobiliers, enjeux énergétiques
AUTEUR
Jean Carassus
Professeur à l’Ecole des Ponts ParisTech, membre du bureau du comité stratégique du Plan Bâtiment Grenelle, consultant – créateur du blog de l’immobilier durable : www.immobilierdurable.eu
Coordonnateur du Task Group n°66 du conseil international du Bâtiment, sur la « mise en oeuvre des politiques d’efficacité énergétique dans le bâtiment dans les 5 continents » 1997-2009 : directeur du département Economie et Sciences Humaines du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB), chef du projet « Comparaison internationale bâtiment et énergie » du PREBAT 1988-1997 : membre du comité de direction de Logement Français, 75 000 logements (Groupe Axa) 1978-1988 : chef de bureau à la direction de la Construction du ministère de l’Equipement 1970-1978 : chargé de mission au service des Affaires Economiques et Internationales du ministère de l’Equipement. Formation : HEC, Doctorat en Economie Paris 9 Dauphine.