Ayant retenu que le bailleur citait des rĂ©fĂ©rences de valeurs locatives reposant sur une mĂ©thode intĂ©grant la dĂ©capitalisation du droit au bail et nâĂ©tablissait pas que les sommes qui avaient Ă©tĂ© versĂ©es au prĂ©cĂ©dent locataire, et non aux bailleurs, correspondait Ă des supplĂ©ments de loyer et que la mĂ©thode quâil proposait nâintĂ©grait pas le caractĂšre dâimmobilisation du droit au bail que le locataire pouvait rĂ©cupĂ©rer lors de la vente de son fonds, la cour dâappel a souverainement fixĂ© la valeur locative des biens donnĂ©s Ă bail sans retenir cette mĂ©thode.
Par cet arrĂȘt, la Cour de cassation apporte une prĂ©cision sur les critĂšres dâapprĂ©ciation de la valeur locative Ă©noncĂ©s par lâarticle L 145-33 du code de commerce dans le cadre du renouvellement dâun bail.
Lâarticle R 145-7 du mĂȘme code ne permet pas de dĂ©terminer si lâĂ©lĂ©ment de comparaison de la valeur locative doit ĂȘtre constituĂ© par le seul loyer effectivement payĂ© par le preneur, et sâil faut Ă©galement prendre en compte le droit dâentrĂ©e initialement versĂ© ou lâincidence de prix de cession du droit au bail.
Cette question fait lâobjet dâimportantes controverses, mĂȘme sâil est admis que la fixation du loyer du bail renouvelĂ© doit prendre en compte les loyers de marchĂ©, les loyers de baux renouvelĂ©s amiablement et les fixations judiciaires.
Un bail peut naturellement prĂ©voir les modalitĂ©s dâapprĂ©ciation du loyer de renouvellement, qui peut donc conventionnellement tenir compte des seuls prix de marchĂ©, mais la loi ignore lâexistence dâune valeur locative de marchĂ© et dâune valeur judiciaire.
Les critĂšres dâapprĂ©ciation de la valeur locative relĂšvent du pouvoir souverain du juge du fond qui adopte le mode de calcul qui lui paraĂźt le plus appropriĂ©, tandis que certains experts intĂšgrent dans les Ă©lĂ©ments de rĂ©fĂ©rence de la valeur locative la dĂ©capitalisation des prix de cession de droit au bail, et ce en sus du loyer conventionnellement prĂ©vu.
Dans cette espĂšce, le bailleur avait fourni des rĂ©fĂ©rences de valeurs locatives selon la mĂ©thode intĂ©grant la dĂ©capitalisation du droit au bail, faisant dĂšs lors apparaĂźtre des prix trĂšs supĂ©rieurs Ă lâestimation expertale.
La cour dâappel avait rejetĂ© cette dĂ©marche au motif que le bailleur ne pouvait Ă©tablir que les droits au bail de ces rĂ©fĂ©rences correspondaient Ă des supplĂ©ments de loyer alors que lâexpert avait relevĂ© que les sommes avaient Ă©tĂ© versĂ©es au prĂ©cĂ©dent locataire et non au bailleur, la mĂ©thode proposĂ©e nâintĂ©grant pas le caractĂšre dâimmobilisation du droit au bail que le locataire peut rĂ©cupĂ©rer lors de la vente de son fonds.
La Cour de cassation rejette le pourvoi du bailleur en soulignant que la cour dâappel avait souverainement fixĂ© la valeur locative sans retenir la mĂ©thode proposĂ©e par le bailleur.
Le fait dâintĂ©grer la dĂ©capitalisation des prix de cession de droit au bail appelle nĂ©cessairement des rĂ©serves lorsquâil sâagit de dĂ©terminer la valeur locative de renouvellement, mĂȘme si cette dĂ©marche paraĂźt admissible lorsquâil sâagit de calculer la valeur du droit au bail dans le cadre de lâapprĂ©ciation de lâindemnitĂ© dâĂ©viction.
En lâĂ©tat de cet arrĂȘt, on doit donc considĂ©rer que la prise en compte par dĂ©capitalisation du prix de cession ne correspond pas aux modalitĂ©s de fixation de loyer telles quâelles dĂ©coulent des critĂšres imposĂ©s par lâarticle R 145-7 du Code de commerce (Cass. 3e civ., 31 mai 2011, n° 10-18662).
AUTEUR
Charles-Edouard Brault – Avocat Ă la Cour – Cabinet Brault AssociĂ©s