Perspectives 2012 dans l’immobilier commercial

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L’immobilier commercial gardera-t-il le vent en poupe d’ici 2012 ?

Après le fort repli des taux de rendement en 2008-2009, la situation s’est certes redressée mais l’environnement reste incertain. D’un côté, la pression sur le pouvoir d’achat des ménages en France, qui perdurera en 2012, pèsera sur l’activité des distributeurs. De l’autre, la concurrence entre les différents intervenants de la filière va se renforcer.

Le regain d’activité observé à la fin de 2010 s’est prolongé au cours d’une année 2011 marquée par le dynamisme des grands groupes du luxe, l’expansion de plusieurs enseignes internationales et les nombreuses ouvertures de nouveaux entrants. Toutefois, la volonté des enseignes de maîtriser leurs coûts d’occupation et les risques inhérents à toute nouvelle implantation n’a pas cessé de caractériser le marché français de l’immobilier de commerces. Très prudentes, la plupart ont conservé un mode de développement opportuniste, continuant de cibler les meilleurs emplacements de l’Hexagone.

Alors que la consommation des ménages s’essouffle (+1,2% de hausse par an en moyenne en 2011-2012 selon les prévisions de Xerfi), les Français sont de plus en plus sélectifs dans leurs choix de consommation et de circuits de distribution. Le commerce en ligne, en particulier, continuera de jouer les trouble-fête. D’un poids encore modeste dans les dépenses totales des ménages (2,8% en 2010), il représente désormais un canal à part entière sur certains segments de marché et en particulier sur celui du PAP féminin où le e- commerce a concentré près de 9% des ventes en valeur en 2010. Du côté des réseaux physiques, l’engouement des consommateurs pour le centre-ville et plus globalement pour les magasins de proximité va peu à peu orienter les décisions d’investissements des acteurs de l’immobilier et celles d’implantation des enseignes.

Comprenons la tendance des professionnels

  1. Ils miseront sur la proximité géographique. Commerces en centre-ville et centres commerciaux de taille moyenne à proximité des centres urbains bénéficient d’un engouement notable. Les enseignes alimentaire et non alimentaire poursuivent le déploiement de leurs réseaux en se rapprochant davantage du consommateur. C’est ce qu’illustre le projet de centre commercial du Jeu de Paume à Beauvais (80 boutiques, 19 000 m2) d’Hammerson qui doit ouvrir en 2013. Ces tendances fortes vont s’accentuer à moyen terme avec les grandes évolutions socioculturelles : vieillissement de la population, réduction de la taille des foyers, conscience écologique grandissante…
  2. En parallèle, ils continueront de jouer la carte de la périphérie. Certes, un prix du carburant structurellement élevé favorise le développement de nouveaux comportements vis-à-vis de l’utilisation de la voiture (optimisation des déplacements, substitution). Mais avec un foncier plutôt attractif pour les investisseurs comme pour les enseignes (loyers moins onéreux), les centres de périphérie restent « relativement » porteurs. D’autant plus que les marges de manœuvres sont encore importantes en matière de restructurations des entrées de ville (cf. le concept Family Village d’Altarea Cogedim). Les acteurs de la filière devront cependant composer avec les évolutions de la réglementation commerciale, et en particulier avec la proposition de loi Ollier encore en discussion…
  3. Ils développeront le marketing relationnel. Alors que la consommation peine à redémarrer dans l’Hexagone, les centres commerciaux doivent impérativement miser sur de nouveaux axes de croissance pour accroître leur nombre de visiteurs, désormais en baisse structurelle. Il s’agit à la fois de créer des lieux de vie et d’être capable de structurer une offre suffisamment fédératrice et différenciante pour générer du flux dans les espaces commerciaux. A titre d’exemple, la foncière néerlandaise Corio a développé une stratégie baptisée « favourite meeting places », destinée à transformer ses centres commerciaux en lieux d’expérience associant commerces, loisirs et culture.
  4. Ils utiliseront le levier Internet pour renforcer la proximité « affinitaire » des centres commerciaux. Le commerce en ligne n’est a priori pas prêt de décoller dans les centres commerciaux, malgré quelques expériences comme celle du partenariat entre Hammerson et Vente- privee.com pour augmenter le trafic dans ses centres. Pour autant, les foncières spécialisées soignent depuis quelques mois les sites Internet de leurs unités avec pour objectif de générer du flux dans les centres commerciaux. La multiplication des services au consommateur en est la parfaite illustration : offre de co-voiturage, ventes flash, prospectus en ligne… Le marketing passe aussi par les réseaux sociaux (facebook et twitter en tête), tandis que les applications pour smartphones sont en plein boom. Si le m-commerce reste pour sa part encore marginal dans l’Hexagone (500 millions d’euros de chiffre d’affaires d’après Xerfi en 2010), il va néanmoins apporter aux mobinautes des occasions supplémentaires de consommer : des achats d’impulsion, mais également des achats contraints par le temps (ventes flashs, enchères…) qui ne seraient pas réalisés sans smartphone et internet mobile à portée de main.

Conclusion

Une distinction croissante entre emplacements n°1 et secondaires : L’animation du marché immobilier des commerces ne doit pas masquer la défiance d’un nombre croissant d’acteurs face à la dégradation du climat économique. La rationalisation de leur réseau de boutiques et la maîtrise de leurs coûts immobiliers restent au premier rang de leurs préoccupations. Cette prudence explique aussi l’appétit persistant des enseignes internationales pour des sites et emplacements n°1 leur permettant de limiter les risques associés à leurs ouvertures. Les centres commerciaux et parcs d’activités commerciales qui ont fait leur preuve, les projets neufs bénéficiant de vastes zones de chalandise et les artères prime de Paris et des principales métropoles régionales demeurent par conséquent la cible prioritaire des enseignes.

Stabilité des valeurs locatives prime : La stabilité générale du marché français masque d’importants contrastes en fonction du format concerné et de la qualité de l’emplacement. Si les valeurs locatives des principales artères ont peu évolué, la montée en gamme de certains axes très peu offreurs et la forte demande des enseignes expliquent le prix élevé que certains groupes sont prêts à payer pour s’y implanter. 2011 a en revanche confirmé le durcissement des conditions de négociation dans les centres commerciaux entre des enseignes fragilisées par des taux d’effort importants et des propriétaires contraints, pour limiter la vacance de leurs biens, d’octroyer davantage de mesures d’accompagnement. Cette tendance concerne notamment les nouveaux centres, dont les conditions de commercialisation pâtissent du démarrage difficile des projets ouverts récemment.

Le rebond du chômage pèsera sur le marché immobilier des commerces en 2012. Les mesures d’austérité auront aussi leur importance. Elles pourraient ainsi affecter la consommation de ménages aux arbitrages toujours plus décisifs. Les enseignes seront par conséquent contraintes de poursuivre l’adaptation de leur offre aux mutations rapides des modes de consommation, dans un contexte rendu très concurrentiel par l’essor du e-commerce et par l’arrivée de nouveaux entrants étrangers cherchant des relais de croissance en dehors de leur base. Les enseignes accélèreront aussi la rationalisation de leur réseau de magasins et tenteront de saisir les rares opportunités disponibles sur les meilleurs emplacements de l’Hexagone, soucieuses de limiter les risques associés à leurs ouvertures.